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Extrait de la dernière des Liomages

Publié par Lara Lee Lou Ka

Extrait de la dernière des Liomages

CHAPITRE 1

Maelis secoua ses longs cheveux fauves aux reflets rouges. Ses yeux d’ambre se plissèrent jusqu’à devenir deux minces fentes. Les imbéciles, se dit-elle en son for intérieur, ils ne m’ont pas crue ! Ils vont droit à la mort !

Se morigénant sur son manque de persuasion quant à convaincre une tierce personne qu’elle pouvait voir son devenir, elle enfourcha prestement son bel étalon à la robe alezane qui répondait au nom de Sauvage. Seule Maelis pouvait le chevaucher sans y risquer sa vie. C’était un cadeau de son père. Lui-même n’avait jamais pu rester plus de quelques secondes sur le dos de cet animal robuste et plus haut que lui.

De la race des Flamboyants, Sauvage n’acceptait de transporter que Maelis et elle seule. Plus d’une fois ses robustes jambes arrière avaient blessé les voleurs qui l’avaient frôlé de trop près ou certains jeunes hommes mal intentionnés vis-à-vis de sa cavalière. Farouche et indépendant, il portait bien son nom. Pourtant, Sauvage avait donné son cœur à Maelis et la jeune fille le lui rendait bien.

De son regard si particulier, la jeune fille scruta l’horizon. Un nuage de poussière s’élevait dans le lointain. D’un coup de talon, elle encouragea sa monture à le rattraper tout en sachant à l’avance ce qu’elle trouverait en arrivant.

Ils ne sont pas si loin, soupira-t-elle, se pourrait-il qu’une fois au moins je puisse sauver quelqu’un dont je vois la mort ?

Bien qu’elle fut consciente que la réponse serait toujours la même, elle fit galoper Sauvage dans la direction qu’avaient prise les voyageurs. Ce n’était que de simples commerçants qui cherchaient leur chemin dans le désert d’Essable. Ils lui avaient demandé conseil et elle leur avait interdit de traverser la piste sablonneuse de jour. Ils s’étaient ri d’elle et ne l’avaient point prise au sérieux.

Elle se pencha sur l’encolure havane de Sauvage et lui murmura quelques mots à l’oreille. Le Flamboyant parut comprendre ce que lui demandait sa cavalière et accéléra le rythme de ses foulées. Maelis voulait les sauver. À quoi cela lui servirait-il de lire dans l’avenir si ce n’était pour protéger les plus faibles ?

Elle trouva leurs corps, à l’endroit exact qu’elle avait vu dans son flashvenir. Égorgés et dépouillés de tous leurs biens, gisant auprès du puits de Nonsansoif. Les brigands d’Essable avaient été rapides. Encore une fois. Maelis savait qu’elle n’aurait rien pu faire. Jamais la lecture de l’avenir ne lui avait permis de sauver qui que ce soit.

Elle n’avait que quinze ans mais sa vie avait été si riche d’évènements tragiques qu’elle avait souvent l’impression d’être bien plus âgée.

Deux ans plus tôt, elle était devenue orpheline et avait été jetée dans cette vie errante bien malgré elle. Enfant unique d’un couple de brigands d’Essable, elle avait grandi dans un univers où étaient encensés la rapine et le meurtre.

Elle avait six ans quand son père lui avait offert sa première arme. Un joli coutelas au manche de nokifa sculpté. Il lui avait appris le maniement et le lancer de l’arme blanche et quelques mois plus tard, la fillette touchait une cible à quinze pas. Sa mère lui avait enseigné l’art de l’esquive et du vol à la tire. Plus tard étaient venues les leçons de combat à mains nues puis à l’épée.

À l’aube de ses treize ans, un régiment d’Hommes du Roi avait rasé le camp des brigands. Une dénonciation. Un traître était sûrement parmi eux. Qui ? Maelis le saurait un jour et elle s’était promis de le tuer. Ce fut une boucherie sans nom.

Seuls les jeunes enfants et quelques adolescents furent épargnés. Pourquoi ? Nul ne le sait. Il se peut que les soldats n’aient pas eu le cœur à massacrer des gamins qui avaient le même âge que les leurs. Peut-être. Ou était-ce un ordre royal afin que les plus jeunes se souviennent de la clémence de Rory Le Galant, premier du nom.

Erreur ! La vengeance était un poison. Les rescapés du massacre l’avaient déjà dans leurs veines. Quel que soit leur âge.

Ce jour-là, tragiquement, Maelis reçut son don de double vue. La mort de sa mère qui le possédait lui transmettait automatiquement. Malgré son jeune âge, la fillette comprit que celui-ci serait exploité à mauvais escient si elle restait avec les survivants. Les mots « sang » et « vengeance » revenaient trop souvent dans la bouche de ceux et celles qui avaient vu leurs parents mourir sous les coups des Hommes du Roi.

Comment sa mère avait-elle pu ne pas prévoir ce massacre ? Longuement, Maelis réfléchit à la question. La seule réponse plausible qu’elle trouva ce fut que nul ne peut prédire son propre sort. Faisant partie de ceux qui seraient tués, sa mère avait eu sa double vue occultée.

Maelis soupira. Elle toucha du bout des doigts les deux magnifiques épées qui lui battaient les cuisses. Ultime cadeau de son père. Celui-ci devait lui offrir pour ses treize ans. La jeune fille les avait découvertes en fouillant la maison de ses parents à la recherche de ce qu’elle pouvait emporter. Elle jeta un œil sur les fontes en cuir qui pesaient légèrement sur les flancs de Sauvage.

Elle n’avait quasiment rien pris. Quelques potions et autres ustensiles médicaux, un peu de nourriture, ses épées, son cheval et le médaillon de Rippour. Le bijou à la facture ancienne pendait à présent à son cou. Héritage ancestral des femmes Liomages. Médaillon qui avait, dit-on, des pouvoirs magiques qui sommeillaient en lui en attendant la révélation de L’Élue. Jusqu’à présent, ce n’était qu’un simple ornement d’or pur qui se balançait entre les petits seins de Maelis au rythme du pas de son cheval.

Secouant la tête, la jeune fille chassa les noires pensées qui lui obstruaient les neurones. Elle avait accompli son devoir de mémoire en enterrant les voyageurs et en gravant une pierre de souvenir. Le plus urgent, vu les nuages sombres qui s’amoncelaient non loin d’elle, était de trouver un abri pour la nuit. Son estomac grommela son mécontentement et elle réalisa qu’elle n’avait rien mangé depuis la veille au soir.

Comme par enchantement, une taverne apparut le long du chemin caillouteux. La seule voie praticable qui traversait la région de la Rogrie. Maelis fronça les sourcils qu’elle avait peu fournis. Quelle était cette auberge ? Ce n’était pas la première fois qu’elle passait par ici et jamais elle n’avait vu cette maison de pierres brunes au toit de chaume. Elle paraissait ancienne, comme si elle avait toujours été bâtie en ce lieu.

Pour connaître la suite des aventures de Maelis, ouvrez le livre de la dernière des Liomages et laissez-vous porter par cette histoire…